dimanche 14 novembre 2010

Porto Novo : Songhaï




Au lever du jour, les pieds dans l’écume mousseuse....

Le départ pour Porto Novo est fixé à 8heures. Je me réveille à 6h pour une promenade matinale le long de l’eau. Je relève ma longue jupe de gitane fleurie, et laisse les tongs à la limite du sable sec .Quand j’atteins le village le plus proche, les hommes sont sur les pirogues et je n’ose pas m’approcher. Quand je reviens face au soleil levant (6H50) une vague plus forte mouille ma jupe. La mer monte. Je crains pour mes tongs et hâte le pas.

En chemin, curieux face à face entre un rat mouillé et trois crabes. Qui hypnotise qui ? Qui avancera le premier ? Une vague manque de noyer le rat qui ne réagit pas. Il est sans doute en train de crever et les crabes s’attaqueront à son cadavre.

A l’abord des paillotes, je retrouve mes pas imprimés dans le sable mouillé. Ils me conduiront à mes tongs. La mer n’est pas encore arrivée là où je les ai laissés. Je suis mes pieds, mes pieds, mes pieds …Dans le sens inverse je vois mes tongs, mes tongs mes tongs imprimés dans le sable mouillé…Ils ne sont pas partis seuls !

Serpent

Devant la paillote des toilettes, un joli serpent vert fluo, au ventre jaune et aux reflets bleus sur la tête, passe devant moi. Extrêmement fin. J’appelle le jeune jardinier :
- « Je vais chercher un bois ».
Il tue d’un coup bien placé derrière la tête le petit serpent. Diane regarde:
- « il n’est pas dangereux ».
Au petit déjeuner, Moronikê confirme :
- « Il n’a même pas de dents »
Heiner regrette la mort du petit animal inoffensif.

Conotou


Porto Novo est à 60 km, toute une expédition. Thierry prend par le chemin de la plage calme entre les jardins, puis par les quartiers des bâtiments officiels avec leurs murs débordant de bougainvilliers et les beaux arbres de l’Ambassade de France. Enfin nous passons devant le port avec sa grande file de camions. Cela me fait plaisir de reconnaître les lieux – je révise Cotonou- Nous arrivons dans la pollution infernale, le bruit, les motos chinoises…Nous enjambons la lagune sur le vieux pont.

La route pour Porto Novo et le Nigeria est encombrée de toutes sortes de véhicules. C’est une route à péage À l’entrée des villages, des ralentisseurs
- « C’est à cause des Nigérians qui conduisent comme des sauvages ! » s’exclame Thierry.
Sentiment universel que le dénigrement des voisins !

Songhaï : agriculture bio

Nous arrivons à 10 heures à l’Institut Songhaï, du nom de l’empire prestigieux s’étendant sur les bords du Niger au 15ème siècle. Le fondateur de cet institut de formation agricole est un dominicain originaire du Nigeria, passé par les Etats Unis. N’importe quel adulte pourvu qu’il parle le français peut y étudier. Des stagiaires venant de toute l’Afrique de l’Ouest, y sont également accueillis.

les écoliers de Sakété

Nous faisons la visite avec un groupe d’écoliers de Saketé encadrés par la directrice de l’école, une maîtresse et un informaticien : Monsieur Samson.

Soja
La visite commence par la pasteurisation du lait de soja dans la toute petite cuve d’un four de terre, loin des industries agro-alimentaires modernes. Le principe est que les agriculteurs puissent appliquer dans leur village, immédiatement, ce qu’ils ont appris. Dans un autre bâtiment, une petite usine d’embouteillage a un autoclave plus moderne. Songhaï commercialise ses sirops et ses confitures. Ils doivent être excellents puisque Heiner m’a fait une commande. Yaourts et fromage de soja sont fabriqués dans un autre atelier.

pisciculture
Dans les bassins de la pisciculture, on élève des tilapias et des poissons-chats. Les oies et les canards, normalement associés à ces bassins, sont enfermés – grippe aviaire oblige.
pas de volailles!
Nous verrons donc les poulaillers à clair voie où on élève les poussins et les pintades, vides en ce moment. Les plantes associées à ces élevages sont intéressantes : le Moringa (sorte d’acacia) est très riche en protéines. On donne ses feuilles aux volailles, mais elles sont également consommées par les humains et guériraient même la malaria. Autre recette contre le palu : les feuilles de papayer triturées avec du citron. L’élevage est placé dans son contexte écologique en association avec des plantes.

Digesteur et production de méthane

Tout est recyclé. La fiente des oiseaux dans les cabanes sur pilotis sert d’engrais. Elle sert également à la production de méthane avec les déjections des porcs. L’installation également est « faite maison ». le manomètre est un simple tube en U. le compresseur relié aux citerne est très simple. Même les brûleurs de la cuisine de la cantine sont forgés à Songhaï. On imagine des villages autonomes du point de vue énergétique avec digesteur à méthane et panneaux solaires !

penisettum et Agoutis

Dans les enclos la grippe aviaire a chassé dindons et pintades mais on nous montre la plante dont ils se nourrissent le Pénisetum( ?) qui ressemble à de la canne à sucre. Les agoutis en mangent la tige. Pas de grippe des rongeurs ! On nous montre les agoutis. Les plus gros pèsent 8 à 10 kg. Ils ressemblent à s’y méprendre à des ragondins.

cailles

Les cailles sont élevées pour leurs œufs qu’on vend au magasin. Elles sont épargnées des mesures d’éviction qui frappent les poulets puisqu’on assure la reproduction sur place (Poussins des poulets sont achetés en France et au Nigeria frappés par H5N1).
Riziculture
La riziculture commercialise un riz coloré, étuvé avec le son puis décortiqué. Culture du soja avec tous ses sous-produits : huile, lait, tourteau.

Retour à la pisciculture avec les alevins de poissons chats, fécondation artificielle, les alevins sont élevés dans les canaux de drainage et dans les eaux usées épurées par les jacinthes d’eau (en fleur : hautes hampes florales bleues rappelant les jacinthes de chez nous) . Les tiges des jacinthes vont dans le digesteur pour la production de méthane. Ici, rien n’est perdu !

Escargots


Sans oublier l’élevage des escargots sous les bananiers. Cachés sous la paille, ils mangent du son et des épluchures d’ananas.

Asticots


L’élevage des asticots et la production du compost complètent le recyclage.

Le génie de cet institut est la simplicité des techniques reproductibles dans presque n’importe quel village sans avoir recours à un outillage spécialisé, sans engrais artificiel, en parfaite harmonie avec l’environnement et presque en autonomie. C’est tout à l’opposé de l’agriculture industrielle consommatrice d’engrais et d’énergie polluante. Ici, Tout est recyclé et il y a création d’énergie. Cette visite est passionnante. Je prends des notes sans relâche pour ne rien laisser échapper.

24 dans un minibus!

D est plus intéressée par nos partenaires de visite, enfants en excursion scolaire, arrivés à bord d’un minibus rouillé où se sont entassés les 21 enfants, les 3 accompagnateurs, le chauffeur et son aide. Les enfants ont revêtu leurs plus beaux atours pour l’occasion. Les petits sont habillés à l’africaine avec des tissus multicolores à grands motifs. L’un d’eux à dominante violette, est à la gloire de je ne sais quel diocèse : églises et croix dans des médaillons de 15 cm de diamètre. Les plus grands sont en costume cravate. L’un d’eux est même en satin blanc. Les filles portent des coiffures sophistiquées, chignons à boucle (à 8 ans !) ou tresses compliquées. Ils sont étonnamment sages et appliqués. Chacun a apporté un cahier et un stylo pour prendre des notes. Leurs accompagnateurs les tancent :« Ecrivez ! » Ils écrivent : les noms des plantes en latin, les variétés des poules pondeuses. Intimidés, aucun ne pose de question, aucun ne bavarde. Ils écrivent sagement.

D leur a parlé de la fête d’anniversaire d’Issaurat du lâcher de ballon. Elle les photographie. L’accompagnatrice en chef est une très belle femme, très bien coiffée, avec une robe africaine aux découpes ingénieuses, et manches à crevés. La dame plus vieille surveille que les petits écrivent bien. Monsieur Samson est beaucoup moins zélé. Il se fait reprendre par la responsable à cause de l’oreillette de son téléphone qu’il a gardée. Il cherche toutes les occasions pour se distraire en faisant la conversation avec Dominique et moi. Il est informaticien et veut développer un centre de formation à l’informatique. On pourra donc lui envoyer les photos par Internet. Vu le volume ce ne sera pas une mince affaire !
Nous terminons la visite par la case des champignons (pleurotes) et par les caïmans.

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