samedi 28 août 2010

Les musées de Trinidad

Promenade le matin dans les rues de Trinidad par un soleil estival. Le vent souffle, atténuant la chaleur. Si, de plus, on choisit le trottoir à l’ombre, la température est parfaite.
Les enfants des écoles vont en rang à la Foire du Livre. Ils sont réunis dans une salle pour assister à un spectacle. En route, ils mangent des glaces ou des oranges. Un homme pousse une petite charrette grillagée contenant des oranges. Avec une curieuse machine, il les pèle, un fin ruban de zeste vert se déroule, puis il coupe l’orange par moitié. Je ne sais pas comment les enfants arrivent à manger sans se mettre du jus partout !

Nous commençons à mieux voir les boutiques, les vendeurs de légumes, les échoppes de pizza. Sur le bord du trottoir, on vend des paniers en vannerie. Des vieux confectionnent aussi des petits objets décoratifs en tressant des fibres de palmier : une tortue portant une graine ovale en guise de carapace, des crocodiles. Les touristes échappés de leurs cars occupent les rues les plus restaurées aux maisons peintes de couleurs vives.

Plus loin, les pavés deviennent plus inégaux, les façades plus délavées, les ferronneries moins élaborées, les intérieurs plus petits et très pauvres. Des chiens squelettiques dorment dans la rue. Toujours des cages à oiseaux.

Musée romantique

A dix heures nous entrons dans le musée romantique en même temps que des fournées de touristes. La présence de cette foule enlève une partie de son charme à la visite. Contrairement à la plupart des maisons de la ville, le palais est construit avec un étage avec des balcons (vue extraordinaire). Le musée romantique s’appelle ainsi à cause de l’époque sans doute. Il est entièrement meublé avec une sophistication extrême : biscuits français, porcelaine de Meissen, cristaux de Baccarat, marbres d’Italie. Seuls les meubles sont cubains. Nous sommes prises en main par une des gardiennes du musée qui malheureusement se contente de désigner les objets précieux et de nommer leur provenance. Le luxe de ces aristocrates sucriers est inouï. Une baignoire de marbre ressemble à un sarcophage antique. Elle ne comporte ni arrivée d’eau ni vidange. C’était la tâche des esclaves. Seule mention de l’esclavage. Tout ce luxe nous éblouit mais la foule gâche notre plaisir.

Musée de l’architecture

Le musée de l’Architecture est moins prisé des touristes en car. La gardienne qui nous sert de guide est plus intelligente que la précédente. La visite est donc beaucoup plus plaisante. Cette belle maison coloniale est bâtie sur un plan similaire à la nôtre, en beaucoup plus grand. La salle de réception est immense : son plafond de cèdre est extrêmement décoré à l’espagnole, presque à la marocaine. Elle est flanquée de salles plus petites servant de chambres à coucher. A l’arrière, une galerie s’ouvre sur le patio. Dans cette pièce, les femmes brodaient, cousaient au frais. La vaste cour est bordée des chambres des domestiques d’un côté, de l’autre d’annexes utilitaires, cuisine extérieure, wc etc... Au fond, un petit édicule abrite une centrale à gaz (acétylène) pour l’éclairage. La citerne couverte se trouve dans un coin de la cour. L’eau de pluie est soigneusement captée par tout un système de gargouilles et de gouttières. Le sol est pavé de marbre importé d’Italie. Un détail architectural nous avait intriguées à La Havane : les demi-cercles, au-dessus des hautes portes de bois, nous les retrouvons ici en fines lamelles de bois disposées en éventail pour l’aération.
Comme au Maroc, la climatisation est l’art de faire circuler l’air dans les pièces aux hauts plafonds. Ici, tout est courants d’air, claire-voie, persiennes, lattes …La belle maison à étage et à galerie ressemblant aux sobrados capverdiens a été transformée en galerie d’art. Une salle est consacrée à un peintre dont la peinture fait penser à la sérigraphie de Robert. Motifs africains, couleurs primaires, dessins un peu naïfs.

Musée municipal

Nous avions remarqué des touristes au sommet d’une tour carrée dominant la plaza Mayor. Nous voulons les imiter et tournons autour du « bloc » puisque c’est ainsi qu’on nomme un pâté de maisons. Nous nous retrouvons dans le hall du musée Municipal occupant, lui aussi, un Palais à étages (le plus grand) construit autour d’un patio à arcades. Deux étages plus une sorte de colimaçon dans une cage en bois et au final, une échelle conduisant à la terrasse. On se bouscule dans l’escalier. Magnifique vue sur la plaza Mayor et la montagne en toile de fond.

Les collections du musée Municipal sont éclectiques, la présentation, un peu vieillotte. Toujours des panneaux bilingues noir sur blanc. Des photos anciennes, des fac-similés de lettres. Toujours une très grande place aux exploits guerriers. Ici, la Révolution n’est pas au premier plan, plutôt les luttes pour l’Indépendance.

L’esclavage

J’apprends de nouvelles choses sur l’esclavage :
- 14 000 esclaves travaillaient aux plantations au début du XIXème siècle
- le développement de ces plantations est relativement récent (un décret autorisant la Traite est daté de 1789)
- c’est l’effondrement des plantations d’Haïti qui a stimulé la production à Cuba

L’une des photos de Manaca avec la tour à 7 étages vue hier me surprend. Sur la photo, pas de trace du mignon village. Près de la tour, une énorme maison (le restaurant actuel) et plus loin, la sucrerie avec quatre cheminée qui a maintenant disparu. C’est surtout l’absence du village qui m’étonne.

Le mural

J’ai oublié de parler du « Mural » qu’on a trouvé dans tous les musées. C’est une grande feuille de papier blanc sur un support d’environ 1mx1.5m sur laquelle toutes sortes d’informations intéressantes sont placardées. Au Musée romantique :
- une information sur la transmission du SIDA avec dessins explicatifs sur la pose du préservatif
- un article de journal daté de fin janvier relatant une explosion de bombe à Moscou
- un article encore antérieur sur les exploits d’un tennisman dans un tournoi
- la liste des employés sur un tableau récapitulatif, certains sont soulignés en rouge
- le nom des employés modèles de Janvier
- au Musée d’Architecture, moins d’informations générales mais un organigramme du personnel et la liste des employés modèles.
- A la galerie d’art, les employés récompensés voient leur nom artistiquement écrits sur du papier kraft tout aussi artistiquement déchiré
- En outre, une liste désigne les critères de sélection de ces employés récompensés (comment ?) : assiduité, retards, initiatives, travail supplémentaire ( ?), agriculture (dans une galerie d’Art !) etc…

l'église

Dernière visite : l’église. Intérieur peint en blanc, sobre. Des chapelles ont été rénovées avec des autels en bois moderne de facture assez grossière. Les statues de bois sont assez étranges : nombres sont habillées avec de vrais habits de tissu. Une scène représente une barque sur des flots de bois bleu portant des personnages (apôtres ?) habillés comme des cubains actuels en chemise kaki avec les manches retroussées. Ils rament au pied d’une Vierge flottant sur des petits nuages baroques.

Pizzas cubaines en monnaie nationale

Comme hier, nous achetons un déjeuner populaire en monnaie nationale (je donne 1$ et on me rend un billet inconnu de 10 pesos) nous achetons deux pizzas cubaines, au fromage jaune, cuites dans des assiettes en fer blanc, type militaire. Le four est un bidon (genre bidon d’essence) horizontal posé sur un support métallique. Je fais la queue, le pizzaiolo m’appelle "companera" ce qui m’amuse. On essore la pizza du gras avant de l’arroser de ketchup. C’est un peu bourratif mais cela a bon goût.
Nous faisons un peu de lessive que nous étendons dans le patio avec celui de la dame.

Plage

Avant d’aller à la plage, nous faisons un petit tour au port de Casilda. De l’ancien port sucrier et esclavagiste, il ne reste plus rien. Quelques baraques et des barques de pêcheurs sur des pontons de bois. Nous sommes mal accueillies, c’est bien la première fois depuis notre arrivée à Cuba.

Pour aller nous baigner, nous avons le choix entre la Plage d’Ancon et celle de La Boca. Du côté de la Boca, la côte est rocheuse tandis qu’à Ancon, il y a une belle plage de sable, deux hôtels et quelques parasols en paille. La Mer Caraïbe ressemble à l’Atlantique du point de vue de la couleur. Le sable est assez grossier mais plein de coquillages. Ce qui change c’est la température ! Je me trempe sans aucun préparatif et nage parallèlement à la plage avec beaucoup de plaisir.

La Boca

La petite station de La Boca est très différente d’Ancon et de ses beaux hôtels pour touristes. Le village de vacances pour Cubains est vide en cette saison, quelques maisons fleuries proposent des chambres à louer.

Le bord de mer est très animé avec des pêcheurs. Certains plongent, d’autres sortent des filets pleins de tout petits poissons brillants ressemblant à des anchois. Nous nous approchons. En marchant sur le rocher, nous découvrons des coraux et des coquillages énormes. C’est un calcaire récifal construit. Nous attendons le coucher du soleil qui se cache dans de petits nuages. Une sorte d’arche est du plus bel effet : l’eau scintille avec des reflets dorés et orangés. Les silhouettes des pêcheurs se découpent sur le rocher. Un petit teckel à poil ras tire sur sa laisse. Il est rigolo. Nous écoutons avec émotion son aboiement de teckel.
Après le coucher du soleil, nous retrouvons les gens du teckel sur une charrette tirée par un cheval, le teckel occupe la place d’honneur derrière le cheval.



Dîner

Hélena a fait des poivrons farcis aux légumes : chou, carottes, courge jaune. C’est délicieux. Les tomates de Cuba ont un goût de vraies tomates. Quand on pense qu’en Crète ou à Chypre, elles poussent hors-sol ! Il faut aller à Cuba pour retrouver des vraies tomates.
Soirée dans le patio, toute la famille, Héléna, sa fille et sa mère regardent le feuilleton brésilien (j’ai reconnu la musique).

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