jeudi 1 juillet 2010

Santo Antao - Excursion avec chauffeur


Au petit déjeuner, j’ai résolu l’énigme du pain : on n’en trouve jamais dans les épiceries pourtant, il existe une boulangerie industrielle dans chaque île. On se demandait bien où on pouvait se le procurer . Ce matin tout le village défile chez Fatima, un torchon à la main pour acheter des petits pains. Les dépôts de pain se trouvent dans des lieux inattendus !

8h, ponctuel, un grand HIACE (15 places) rouge nous attend .Au volant, Gabriel, métis très clair, jeune grassouillet, en jeans. Il parle beaucoup moins bien français qu’on l’avait cru hier, il est ravi que je comprenne un peu le Portugais. A moi donc de faire les efforts de conversation si nous désirons une visite commentée .A Fogo, Albino avait été un guide remarquable mais il était polyglotte ? le prix a aussi augmenté .

Pour arriver à Ribeira Grande nous roulons sur quatre kilomètres de corniche au dessus d’une mer agitée de belles vagues blanches. Il n’y a pas de vent du tout, par jour de tempête cela doit être impressionnant !

Ribeira Grande est une agglomération assez laide. Impossible d’en saisir le plan de prime abord : nous passons par une ruelle devant un petit marché, arrivons sur une rue commerçante avec des banques le bureau de TACV, deux hôtels minables. Plus loin un quartier plus moderne, un marché africain installé dans des baraques de tôle grise, beaucoup d’aluguers, un garage. Gabriel stoppe au garage pour voir le loueur de voitures, peine perdue, tous ses véhicules sont occupés. Peut être, n’inspirons nous pas confiance. En voyant l’état des pistes, je le regrette moins.
Le minibus s’engage dans la Ribeira Grande, vallée assez large et cultivée. Au début nous voyons surtout de la canne à sucre, des manguiers magnifiques et je découvre les arbres à pain. Parmi les légumes du dîner, j’avais trouvé une tranche verdâtre d’un légume inconnu un peu farineux au goût situé entre la patate douce et l’artichaut. Fatima m’avais expliqué que c’était le fruit de l’arbre à pain. Ces arbres sont très grands aussi hauts que les manguiers mais plus larges avec de belles feuilles découpées très décoratives et des fruits vert clair hérissés de piques.
Les maisons sont perchées sur des pentes incroyables, parfois sur des arêtes vives où il y a tout juste la place de construire une maisonnette. elles sont toutes très fleuries. Les fleurs d’agave –ou de sisal- donnent du pittoresque aux photos. Les plus anciennes sont en pierre noire couvertes de paille (cela se dit pareil en Portugais), les plus soignées sont peintes en blanc, rose ou vert vif, la plupart sont en parpaing. Ici, nous faisons une découverte prosaïque : les hommes façonnent sur place des briques de parpaing en tamisant les graviers ou le sable prélevés dans le fond de la ribeira en faisant des trous disgracieux, des cadres métalliques percés de trous faits à la main servent de tamis primitifs. Ils mélangent au ciment le gravier sur le bord de la route et remplissent des moules rudimentaires. Les parpaings sèchent, alignés. Peut être les maçons sont ils des professionnels mais il semble que chacun construit avec l’aide de sa famille ou des voisins sa maison, rehausse d’un étage, rajoute une pièce, tout en habitant les pièces terminées . cela donne aux villages un aspect inachevé, de chantier perpétuel. Quand il y a du travail aux champs ou du grogue à distiller, quand il n’y a plus de sous, le chantier s’arrête et la maison reste en attente… Les harmonieuses maisons basses aux frontons portugais se transforment en immeubles à étages avec des terrasses hérissées de ferrailles qui dépassent et rouillent, d’escaliers qui ne mènent nulle part . Les animaux, eux, sont logés dans des abris traditionnels souvent arrondis, muret de moellons grossier avec un toit de paille couvrant à moitié l’ouverture ronde.

Les nuages , accrochés aux sommets se détachent. Il fait beau .. Je dois me gendarmer pour ne pas tout prendre en photo . Gabriel s’arrête volontiers (quand la route le permet) Une excursion en voiture est une sorte de torture pour le photographe. Vu de mon siège un cadrage me plaît, descendue sur la route, je ne le retrouve plus. Le premier plan a disparu . dans le viseur, le sujet paraît lointain. et quelconque .

La route s’élève vite à flanc de la montagne. Nous passons devant notre première trapiche (distillerie de grogue) Demi tour à Garça de Cima ..

Point de vue magnifique sur Horta da Cima, village au fond d’une vallée très verte. Puis descente en lacets rapide, la route devient piste et plonge dans un canyon étroit : scènes de western : un cavalier sur un magnifique cheval marron, encore plus insolites ces deux colporteurs très noirs sans doute sénégalais tenant un portoir sur lequel sont accrochés des montres des lunettes, des bricoles, un bandana stars and stripes. Je n’ai pas le bon réflexe de sortir l’appareil photo, dommage …

Pour atteindre Cha da Igreja, le minibus gravit une pente incroyable, nous faisons silence, chauffera ou chauffera pas ? Bravo Toyota! le HIACE monté sans encombre . j’en fais part à Gabriel qui dit que les Peugeots sont bonnes à Sal ou à Sao Vicente mais qu’elles n’auraient pas supporté l’ascension . Il me montre le thermomètre du compteur.

Dans la canne à sucre toute une troupe est occupée à construire une levada. J’ai oublié de parler des levadas que nous suivons dans le paysage depuis ribeira Grande. Certaines sont suspendues sur des ponts très fins Elles ne ressemblent pas à celles de Madère : ce sont des rigoles d’une vingtaine de cm de largeur et de profondeur avec une fine bordure de ciment de chaque côté . pas de chemin qui les accompagne comme à Madère . comment travaillent les levadeiros chargés de leur entretien ?

Après la campagne riante, nous traversons une ribeira ,et arrivons au village de pêcheurs de Cruzinhas da Garça : un port minuscule abrité par un gros rocher, quelques barques à quai . le village est gris parpaing, noir basalte, très sale et très misérable. La mer envoie des paquets d’écume. Gabriel nous propose une promenade à pied. Distribution de crayons . Je descends seule au port . Sur le rocher humide grouillent des dizaines de tout petits crabes.
Nous repassons par Cha da Igreja, le soleil est déjà haut, la lumière moins belle.

Trapiche

Coculi : nous nous engageons dans une petite ribeira cultivée, nous visitons une trapiche. Un jeune commente la fabrication de l’Agua Ardente. La canne est écrasée entre des rouleaux (moteur électrique) le jus arrive dans des barriques stockées dans un appentis. . Pendant la fermentation, de grosse bulles soulèvent la surface. du liquide grisâtre .Elle dure plusieurs semaines puis on distille dans alambic primitif. Un four alimenté par des paquets de feuilles de canne chauffe une sorte de chaudron (un bidon métallique) le refroidissement s’accomplit le long d’une gouttière creusée dans du bois où coule l’eau . Au bout d’un vulgaire tuyau en plastique noir (comme les tuyaux d ‘irrigation) on récupère l’agua ardente. Comment échapper à la dégustation et à l’achat ? le plus simplement du monde : j’explique qu’il est beaucoup trop tôt pour boire et que l’alcool à jeun nous assommerait par cette chaleur (je mime) . je renifle la grogue :cela sent très bon . Ils n’insiste pas du tout. De toute façon la grogue est dans de grosses barriques, si nous avions voulu en acheter il aurait fallu apporter notre propre bouteille.
Gabriel nous conduit jusqu’au dernier village au bout de la route, croisant des enfants qui sortent de l’école portant leurs cahiers, les objets confectionnés pendant l’année, cartons, tableaux de nouilles ou de coquillages, boutures dans des pots de conserves. C’est le jour des vacances, ils lancent des vivats qui doivent dire que l’école est finie.
D essaie de photographier une petite fille portant une belle bouture sur sa tête, ses copines sont jalouses et se placent devant elle. On a bien du mal à les disposer pour que la « vedette » soit visible.
Nous descendons la piste à pied . Gabriel nous attend plus bas avec ses copains de la distillerie. Nous déjeunons sous un manguier, à nos pieds une petite levada. Des gamins nous importunent ‘- »money! « la grande sœur ou la mère les éloigne.
Spectacle inattendu : un âne s’est échappé, descend la piste au grand galop poursuivi par un gamin pieds nus.
crevaison
Sur le gué cimenté, plein de bouteilles de bière cassées, le Hiace se retrouve avec un pneu crevé. Heureusement Ribeira Grande est toute proche . Gabriel porte le pneu au garage et nous en profitons pour aller changer de l’argent à la banque.
Le ciel s’est couvert, il fait tout gris .

bananes ignames

Dernière expédition : la petite Ribeira de Torre qui aboutit à la Ribeira Grande encore plus verdoyante que les autres . Des bananeraies se pressent sur ses flancs . dans son creux, coule de l’eau qui arrose des ignames . les arbres à pain sont encore plus majestueux, je crois reconnaître un avocatier. Fin de la ballade sous un tout petit pic, une aiguille volcanique ( ?) comme un obélisque

lampe de chevet

Notre lampe de chevet est inénarrable : sur un socle de laiton, la lampe est en porcelaine, un bouquet de fleurs en plastique orange sert d’abat jour. Pas d’interrupteur, quand on tape faiblement sur le socle, la lampe s’éclaire faiblement, au deuxième coup, elle s’éclaire bien, au troisième coup tout s’éteint. D’où provient cette merveille ?

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